La betterave rouge, ce n'est pas que le sucre ! D’apparence banale et surtout d’usage courant, la racine de la betterave n’en est pas moins pleine de vertus. Et cela en dépit du nom peu valorisant - Beta vulgaris rapa... - que les botanistes lui donnent. Si depuis les blocus imposés par les britanniques à la France au XIXème siècle, la betterave a fait la fortune de ceux qui la cultivent, c’est évidemment parce que ses racines sont riches en sucre. Mais ce n’est pas tout. Dans la betterave dont vous faites vos salades, vous trouverez une quantité importante de vitamines et de minéraux. Côté vitamines, elle vous apportera de la vitamine A - pour les yeux et en particulier la vision de nuit ou en éclairage réduit - des vitamines du groupe B - B1 pour le système nerveux, B2, B3 et B5 pour la peau et les muqueuses - de la vitamine PP pour la peau, le système nerveux et la digestion, de la vitamine C dont on n’a plus besoin d’expliquer les bienfaits, et enfin de la vitamine E pour la spermatogenèse et la fonction reproductive en général. Vous bénéficierez également de sa richesse en minéraux : magnésium, phosphore, manganèse, cuivre, fer, zinc, calcium, potassium, brome, chlore, lithium, sodium, soufre... Autant dire que vous disposez là d’un produit quasiment « bon pour tout », recommandable dans les syndromes de déminéralisation ou de fatigue, contre les troubles de la digestion et les affections hépatiques ou hépato-biliaires... La racine de betterave est également un reminéralisant puissant, aux vertus tonifiantes et énergétiques. Vous pouvez en absorber à peu près autant que vous pouvez, sans autre effet secondaire qu’une... coloration rouge des urines. Ne vous laissez pas impressionner par la chose. Cette coloration cessera dès que vous ne consommerez plus de betterave... Longue à cuire, la betterave? Ce légume d’hiver vaut pourtant la peine qu’on lui consacre un peu plus de temps et qu’on le mette plus souvent au menu. D’abord, c’est un des 10 légumes qui ont le meilleur potentiel pour protéger les cellules contre le développement des maladies cardiovasculaires, des cancers et des maladies liées au vieillissement. La betterave fait l’unanimité quand elle rentre dans la composition de l’éthanol et donc des biocarburants. Comment est-elle arrivée jusqu’à nous et dans quel contexte ? Histoire d’une bête rave qui a su prendre sa place dans notre agricultureOn la dit potagère, fourragère ou sucrière. Sa couleur rouge sombre, sa douceur, son goût... Christine Barbace, de la Mission Agrobiosciences, revient sur l’histoire de la Betterave et, aussi, sur nos souvenirs d’enfance. Elle fait aussi l’unanimité quand elle rentre dans la composition de l’éthanol et donc des biocarburants. Comment est-elle arrivée jusqu’à nous et dans quel contexte ? Histoire d’une bête rave qui a su prendre sa place dans notre agriculture. Dans la littérature grecque vers 420 av. J.C, la betterave faisait déjà parler d’elle. A l’époque, un miel végétal était extrait de sa racine et ses feuilles servaient à l’alimentation du bétail. Au moyen-âge, cette cousine de la bette et du céleri-rave était le plus souvent cultivée dans les monastères de France et d’Espagne, puis sur tout le territoire européen. Dès 1575, l’agronome français Olivier de Serres remarqua sa forte teneur en sucre, mais l’intérêt pour la betterave sucrière ne sera suscité qu’en 1747 quand Andreas Sigismund Marggraf, un chimiste prussien, démontrera que les cristaux sucrés de betterave sont les mêmes que ceux de la canne à sucre. Il faut attendre quarante ans et la guerre contre l’Angleterre pour que cette plante ressorte de nos champs. Le blocus continental privait la France de sucre de canne. Mettant de côté les recommandations des scientifiques et l’avis du célèbre Parmentier lui-même, Napoléon Ier lança alors un vaste programme accordant 100 000 arpents de terre à qui voudrait cultiver la betterave sucrière. L’Empereur fut définitivement conquis lorsque le banquier Benjamin Delessert, ayant repris les travaux de Marggraf, lui présenta un succulent pain de betterave - ce qui valu d’ailleurs au banquier le titre de baron d’Empire. Napoléon Ier s’engagea alors à subventionner les recherches des industriels et délivra 500 licences pour la fabrication du sucre de betterave. A la fin du blocus, la canne à sucre fit sa réapparition, mais son prix prohibitif, dû à l’abolition de l’esclavage en 1848, conforta les français dans leur choix. Au fil du temps, la construction de grosses unités de production, les améliorations techniques et la sélection des betteraves feront le reste. Actuellement, l’Europe a une production de 120 millions de tonnes de betterave qui produisent à leur tour 16 millions de tonnes de sucre blanc, et parvient à assurer 90% de ses besoins. Histoire La première référence à la famille des plantes appelée Beta se trouve dans la littérature grecque vers 420 av. Jésus Christ. Voici les grandes dates de l'histoire de la betterave sucrière… 1575 : L'agronome Olivier de Serres remarque la forte teneur en sucre de la betterave, et son jus semblable à un sirop de sucre qu’elle rend en cuisant. 1747 : Le chercheur allemand Andreas Sigismund Margraff présente une thèse consacrée à l’extraction du saccharose présent dans différentes plantes, dont la betterave sucrière. Il démontre que les cristaux sucrés de betterave sont les mêmes que ceux de la canne à sucre. 1796 : A l'instigation du roi Frédéric II, un pharmacien nommé Charles-François Achard construit la première sucrerie à betterave à Kürnen-sur-Oder, en Silésie. Elle traite 70 kilos de betterave par jour selon le procédé de Marggraf. 1806 : Le 21 novembre, Napoléon 1er instaure le blocus continental pour répondre au blocus économique imposé par les armées britanniques sur les ports français. Toutes les marchandises britanniques sont dès lors prohibées sur le sol français, ce qui inclut le sucre de canne provenant des Antilles. 1808 : La route des Antilles étant coupée, le sucre de canne disparaît des boutiques. Parmentier recommande à Napoléon 1er le sucre de raisin pour remplacer celui de canne. 1810 : Benjamin Delessert offre à Napoléon 1er deux pains de sucre de betterave parfaitement cristallisés. Le ministre de l'Intérieur présente deux pains de sucre de betterave à l'Empereur. Gravure de David. 1811 : Le décret du 25 mars impose la mise en culture de 32 000 hectares de betteraves, et 5 millions de francs sont destinés à financer cette opération. 1812 : Napoléon visite la fabrique de sucre de Benjamin Delessert à Passy, et lui remet la Légion d’honneur. Napoléon remet sa Légion d'honneur à Benjamin Delessert Image d'Epinal imprimée vers 1880 Le 15 janvier, un nouveau décret établit la création de cinq écoles de chimie pour la fabrication de sucre, et de quatre fabriques impériales. 500 licences sont accordées aux personnes désirant fabriquer du sucre de betterave. La fabrique de sucre de Benjamin Delessert Aquarelle, vers 1810 1814 : Chute de l’Empire. 1815 : Le sucre de canne fait son retour en France et les cours du sucre s’effondrent. La plupart des fabriques de sucre disparaissent. 1828 : 89 sucreries produisent 4 400 tonnes de sucre. 1833 : 120 sucreries produisent 7 000 tonnes de sucre. 1837 : La loi du 18 juillet promulgue un impôt de 10 francs par quintal de betterave : de nombreux départements cessent la culture betteravière et des fabriques ferment. 1839 : L'ordonnance du 21 août dégrève les sucres coloniaux et fait disparaître de nombreuses fabriques de sucre de betterave. "L'enterrement du sucre indigène". Caricature de Granville parue dans la Mode du 1er octobre 1939 1843 : Lamartine dépose un projet de loi visant à faire disparaître les fabriques de betteraves, tandis qu’Adolphe Thiers prend la défense de la betterave et de son sucre. 1848 : L'abolition de l'esclavage engendre une forte hausse du prix du sucre de canne et une diminution de sa production, au bénéfice des betteraviers, et les sucreries améliorent progressivement leurs rendements grâce à la construction de grosses unités de production. La France ne compte plus que 308 fabriques de sucre de betterave. 1854 : 1ère distillerie de betteraves à La Manche, dans l’Aube. 1862 : Invention du saccharimètre optique qui permet de travailler plus efficacement sur la sélection des variétés. 1870 : La France produit 300 000 tonnes de betteraves et devient le 1er producteur européen. Intérieur d'une fabrique de sucre de betterave. Figuier : Les Merveilles de l'Industrie 1889 : Le sucre de betterave représente 60% de la consommation mondiale. 1899 : Le Syndicat des fabricants de sucre crée un « Laboratoire central » pour effectuer l’analyse des betteraves. 1902 : Le 5 mars, la Convention de Bruxelles établit le 1er accord international sur le sucre. Chargement d'un train de betteraves. Carte postale de H. Marel, vers 1910 La démarieuse de betteraves L'arracheuse de betteraves Distillerie La Couronne Cartes postales du début du siècle 1913 : La campagne betteravière 1913-1914 a permis la production de 9 millions de tonnes de sucre. 1914 : Le 3 août, la guerre est déclarée. Les plus importantes régions betteravières se situent dans les zones de combat. La sucrerie d'Eppeville (Somme) dévastée 1916-1918 : Le sucre est rationné. 1921 : le 3 juin, MM. Aimé Monmirel, Fleurant-Agricola et René courtier fondent la Confédération Générale des planteurs de Betteraves. Parution du 1er numéro du Journal de la Betterave, qui deviendra Le Betteravier Français en 1952. 1922 : Le 8 avril, les accords de Béziers réservent aux alcools « naturels » la consommation de bouche, tandis que les alcools « industriels » sont achetés et contrôlés par l’Etat qui les revend. 1923 : La loi du 28 février complète le dispositif précédent et crée un « carburant national ». Le régime économique des alcools sera institué par le décret-loi du 30 juillet 1935. 1927 : La Confédération Internationale des Betteraviers Européens est créée. 1928 : Création d’un « Comité mixte d’entente et de conciliation des intérêts betteraviers et sucriers ». 1930 : Record de production de sucre : 1 063 000 tonnes. 1931 : Création de l’Institut International de Recherches Betteravières. 1932 : Création du Groupement interprofessionnel pour la promotion du sucre, appelé aujourd'hui le CEDUS (Centre d'Etudes et de Documentation du Sucre). 1937 : Signature d’un accord international sur le sucre et création du Conseil International du Sucre. "Pour faire des betteraves en 1940" Brochure éditée par la Commission interprofessionnelle pour l'amélioration des procédés mécaniques et techniques de culture de betterave. 1940 : Le sucre est de nouveau rationné. Carte de rationnement 1944 : Le Journal Officiel du 21 octobre annonce la création de l’Institut Technique de la Betterave industrielle. 1953 : Signature d’un nouvel accord international du sucre. 1958 : Création du marché commun. 1960 : La France produit 2 546 430 tonnes de sucre. 1965 : Jusqu’en 1969, la culture betteravière connaît la révolution de la mécanisation intégrale. 1968 : Le Fonds d’Intervention et de Régulation du marché du Sucre est créé par le décret du 9 juillet. 1969 : le Comité Interprofessionnel des Productions Saccharifères est créé par le décret du 3 avril. 1972 : Découverte de la rhizomanie. 1976 : Année de sécheresse : le rendement des betteraves est catastrophique. 1985 : La loi du 11 juillet met un terme au monopole d’Etat en matière d’alcool. 1989 : 25 pompes à essence proposent du supercarburant éthanolé. 1992 : Le 21 mai, la nouvelle Politique Agricole Commune entre en vigueur. 1997 : En 2 siècles, la production de sucre de betterave est passée de 700 à 10 000 kilos à l’hectare. 1999 : Réforme de la PAC, avec le soutien au développement rural et la fixation d'un cadre financier pour la période 2000-2006. Cette réforme est destinée à préparer l'arrivée de 10 nouveaux membres et à rendre la PAC compatible avec les règles de l'OMC. 2003 : Accords de Luxembourg : pour se mettre en conformité avec les prescriptions de l'OMC, la nouvelle PAC introduit le découplage des aides et entérine la diminution progressive des restitutions à l'exportation. 2005 : Le gouvernement français annonce des objectifs d’incorporation des biocarburants dans les carburants qui devancent une Directive européenne qui préconisait un taux d’incorporation de 5,75% pour 2010. La France vise 5,75% en 2008, 7% en 2010 et 10% en 2015. 2006 : L'Assemblée nationale approuve le 19 octobre un amendement du gouvernement au projet de budget 2007 pour la mise en place d'un "régime fiscal favorable" pour le "superéthanol E85". La betterave est originaire d’une espèce sauvage du bassin méditerranéen et d’Asie Centrale appartenant à la famille des chénopodiacées. Sa couleur rouge provient de la bêtacyanine, un pigment de la famille des anthocyanines. Betterave sucrière (B. vulgaris v. altissima) Que serions-nous devenu sans la découverte de la betterave sucrière au XIXe siècle qui produit, à elle seule, 50% du sucre raffiné! La racine, riche en saccharose, est essentiellement utilisée pour la fabrication du sucre et dans une moindre mesure pour la distillation. Il ne faut pas la confondre avec la betterave potagère. Saviez-vous que l'expansion de la betterave sucrière est due, en grande partie, à Napoléon 1er. Il offre à la France la possibilité de remplacer le sucre de canne qui n'arrive plus dans les ports à cause de la guerre contre l'Angleterre et du Blocus continental en lançant un vaste programme: Il offre pas moins de cent mille arpents de terre à qui voudra cultiver la betterave et il s'engage à subventionner les recherches des industriels à hauteur d'un million de francs. Question cuisine On consomme la betterave cuite ou crue (surtout lorsqu'elle est jeune). On peut aussi utiliser les feuilles de la même façon que les épinards. Les betteraves se conservent longtemps en chambre froide ou au réfrigérateur après avoir taillé les feuilles au niveau du collet. Cuite, la betterave se marie bien à la mâche, aux pousses d’épinards et de façon générale à toutes les salades vertes. Les nordiques la mélangent à des harengs marinés, à des cornichons aigre-doux ou à des pommes fruits. Question cuisson, on peut l'éplucher et la cuire à l'anglaise dans l'eau bouillante, la râper et la faire braiser au beurre ou la cuire au four avec un filet d’huile. Valeurs nutritives au 100 g 1.5 g de protéines 10 g de glucides 44 calories les fibres sont importantes puisqu'elles atteignent 2,5 à 3,1 g riche en potassium, calcium, magnésium, soufre, fer, cuivre, zinc, manganèse, acide folique et bêta-carotène vitamines B1, B2, C, E et PP Propriétés médicinales C’est cru qu’elle est le plus thérapeutique. Apéritive et énergisante, elle est aussi bénéfique pour les reins, la grippe, la constipation et l’anémie. On lui attribue même des propriétés anti-cancérigènes. La betterave pauvre en gras est très riche en sucre et de ce fait n’est pas recommandé aux diabétiques. Très riche en Bêta-carotène, laxative, c'est le légume idéal pour un balayage intestinal.