Césarienne, une mode au mépris du danger La césarienne, une nouvelle mode ? De plus en plus de femmes délaissent l'accouchement classique, et pas seulement pour des raisons médicales ! Les médias anglo-saxons l'ont baptisé le too posh to push. Traduisez ' trop classe pour pousser '. Un nouveau phénomène qui sévit depuis déjàquelques années. Sa particularité ? Choisir la césarienne plutôt que l'accouchement par voie basse. Claudia Schiffer, Victoria Beckham, Madonna? la liste de celles qui auraient déjàdit oui àcette ' tendance ' est longue? très longue.Aujourd'hui, au Brésil, 80 % des naissances en clinique privée se feraient ainsi, selon les sources de www.cesarienne.net. Et bien sûr, si on ne peut pas attribuer àcette mode la responsabilité entière des accouchements par césarienne, la plupart des médecins s'accordent àdire qu'elle y contribue considérablement.D'après une étude réalisée par la DREES* et intitulée ' La situation périnatale en France en 2003 ', le taux de césariennes au sein de l'Hexagone est passé de 17,5 % à20,2 % entre 1998 et 2003. Mais plus précisément, le pourcentage de césariennes avant travail (1 fois sur 2 librement choisie par la mère) est passé de 6 % en 1981 à9,2 % en 1998 pour atteindre 12,5 % des accouchements en 2003.Généralement, cette méthode est réservée aux accouchements difficiles, s'accorde toutefois ànuancer l'étude : présentation du bébé par le siège, pathologie de la mère, grossesses multiples, bassin trop étroit. ' Elle peut également résulter d'une angoisse psychique particulière suite àun viol, àdu vaginisme ou àune forte angoisse du sexuel. ' Reste que ces diverses raisons ne concernent qu'une partie des femmes et que certaines réclament l'opération miracle dans le seul but de mieux s'organiser, de se préserver ou de ne pas avoir mal. Il y a celles qui souhaitent insérer la date de leur accouchement dans leur emploi du temps. Il y a celles qui redoutent une naissance susceptible d'être difficile. Il y a celles qui souhaitent protéger leur muscle pelvien. Il y a celles qui ne désirent pas mélanger le sexuel avec la maternité?' Auparavant, les femmes subissaient. Aujourd'hui, elles sont dans le "ce que je veux comme je veux" et profitent des avancées médicales, souligne Élisabeth Darchis, psychologue clinicienne en maternité.C'est un peu comme si elles souhaitaient échapper àleur condition féminine, àtout ce que leurs grands-mères ont pu subir, en refusant d'enfanter dans la douleur. Alors elles programment leur accouchement en sachant qu'en une heure, ce sera fait. ' Une démarche qui s'inscrit en tout cas dans l'ère du temps, où chaque minute est précieuse, où le passage sans transition de la préparation du repas àla vérification des devoirs devient une norme, où la femme doit remplir tous les rôles àla fois et s'y montrer efficace.' Pourtant, s'étonne àdemi Sophie Gamelin-Lavois, consultante en périnatalité, la césarienne est un acte chirurgical qui comporte des séquelles, elles aussi douloureuses (cicatrice, immobilité) comme àla suite de toute opération, et plus durables que des contractions? 'De toute façon, ici, outre la douleur, de multiples facteurs sont souvent évoqués. ' Beaucoup de femmes que je rencontre et qui souhaitent recourir àla césarienne sont très déterminées, nous raconte Erika Teissière, psychologue clinicienne au service de gynécologie du CHU Poissy?St-Germain. Certaines veulent vivre pleinement leur maternité tout en conservant leur intégrité physique et sexuelle. ' D'autres craignent les descentes d'organes ou les déchirures. ' La déchirure est un risque, acquiesce Élisabeth Darchis. Mais l'épisiotomie se répare vite et les déchirures n'altèrent pas la beauté et n'empêchent pas la sexualité. Seulement, le vrai problème, je crois, c'est que nous vivons dans une société où l'intimité est de plus en plus exposée ; on veut l'entretenir, la maîtriser. On voit même des femmes qui, quelques semaines après avoir accouché, se font refaire entièrement le vagin àcoup de chirurgie esthétique. Elles veulent tout, tout de suite, sans laisser faire le temps. ' Et l'experte de conclure : ' psychologiquement, mettre au monde par voie basse, en plusieurs heures, permet d'investir plus facilement l'accouchement. Avec la césarienne, bien que les choses se passent plus rapidement, la mère met plus de temps àcomprendre ce qui se passe, àréaliser qu'elle devient mère. ' * Direction de la recherche des études de l'évaluation et des statistiques