Navet Il est curieux que le navet, né en Europe sur les bords de la Méditerranée, aliment de base de l’alimentation quotidienne pendant des siècles, ait acquis une si fâcheuse réputation. Le mot a pris même une consonance péjorative dans grand nombre d’expressions : avoir un sang de navet désigne le manque de courage et lorsqu’on dit d’un film «quel navet» ce n’est certes pas un compliment ! Aimé par certains ou franchement détesté par d’autres, il n’est plus le légume vedette des recueils de botanique. Il est cependant en voie de réhabilitation. Pauvre navet, racine potagère primordiale, cultivé dans tous les jardins potagers depuis qu’ils existent avant d’être cultivé en plein champ et qui présentait un grand nombre de variétés. Pourquoi cette mise à l’écart ? D’abord peut-être la lassitude générée par une consommation trop fréquente. Ensuite, une consommation tout au long de l’année de navets creux et fibreux, au goût mauvais qui fait oublier que les petits navets du printemps vendus en botte, avec leurs fanes qui sont délicieuses et se cuisinent comme les épinards, sont absolument succulents. Enfin, parce que le navet est entaché de ruralité et de pauvreté et qu’il a été délaissé au profit de légumes plus «nobles». Histoire Et pourtant, la culture du navet, Brassica rapa de la famille des Crucifères, cette racine née en Europe sur les bords de la Méditerranée et qui nourrissait les hommes et les bêtes, s’était largement répandue autour de Paris à partir du 17ème siècle, augmentant les superficies déjà utilisées à cet effet dès le Moyen-Age et instituant une culture forcée sur couches et très vite une sélection des semences par les maraîchers. Les espèces de navets étaient originellement nombreuses, Pline en cite 6 et Olivier de Serres dit d’eux : « S’en voient de grands, de petits, de blancs, de noirs, de gris, de jaunes et de tous s’en trouve de bons et délicats, entre lesquels, communément, les petits et noirs sont les plus prisés. », les maraichers ont obtenu au XIXème siècle des variétés nombreuses qui se distinguaient • par la forme – plat, rond et long – • par la couleur – blanc, gris, noir, jaune et rouge violacé, mais aussi bicolore, blanc et jaune à collet vert ou violet • par les textures et feuillages que nous montrent le catalogue Vilmorin qui présente jusqu’à 34 variétés de navets en 1925. Leur aire de production s’étant considérablement restreinte, nous ne trouvons maintenant sur les marchés que les longs blancs et les ronds à collet violet. Cependant, certains agriculteurs avaient précieusement gardé quelques semences de navets qu’ils cultivaient pour eux, tels le navet d’Orret en Côte d’Or, petit, blanc et long, le navet noir de Pardailhan et la Boulette de Bussy dans la Marne, dernier rescapé d’une tradition de la culture du navet en Champagne, cultures confidentielles qui trouvent maintenant une clientèle de connaisseurs. Qualités et cuisine du navet C’est un légume très nutritif comme toutes les racines, il contient du calcium et du potassium et de la vitamine C. On le confit dans la saumure en Alsace, il était conservé dans le sable pour être utilisé dans les potages, les ragoûts et le pot au feu. Au début du siècle, on trouvait dans les livres de cuisine encore de nombreuses recettes de navets, seuls ou en accompagnement, comme le célèbre canard aux navets. Les petits navets nouveaux glacés sont un régal tout comme le consommé de fanes de navets fraîches.